Recit 9

 

 

DE FUKUOKA A TOKYO

NUIT A LA BELLE ETOILE

 

5 heures du matin, ce mercredi 6 septembre, c'est la lueur du jour et l'humidite sur nos duvets qui nous reveillent.Premiere nuit en Asie et premiere nuit a la belle etoile de notre voyage ! Nous sommes dans un champ abandonne a cote de l'aeroport de Fukuoka, notre arrivee tardive la veille nous a oblige de rester a proximite de l'aeroport. Apres le froid de l'Alaska, c'est d'abord une forte hygrometrie et, tot le matin, une chaleur tropicale qui demarre une nouvelle etape dans notre voyage. Nous refaisons la repartition de nos sacoches en mettant au fond les habits « d"hiver » et partons dans la matinee en direction de la ville. L'apprentissage de la conduite a gauche en velo est immediat et un brin deconcertant mais la premiere difficulte evidente est de s'orienter. Nous restons plusieurs minutes a observer les panneaux de signalisations quasiment incomprehensibles. Nous tachons de les comparer a notre carte routiere constituee a 95% en pictogrammes. Nous interpelons quelques passant pour nous aider. Difficile de se faire comprendre, nos interlocuteurs ne semblent pas maitriser l'anglais et nous repondent en japonais.bien sur. Notre progression vers le centre de Fukuoka est lente. Nous nous sentons a ce moment precis bien loin de vous en France ! Notre entrée dans la ville se fait au milieu d'hommes en costume-cravate.Cela 'sent' le travail ! Beaucoup se deplacent a velo et certains citadins portent autour de leur cou une serviette comme s'ils sortaient de la piscine. Ils s'epongent regulierement car il fait tres chaud et lourd.entre 35 et 40 degres. Ici les velos ont leur place.sur le trottoir. Les femmes en tailleur pedalent en tenant leur parasol d'une main et le guidon de l'autre. Le velo en ville n'a pas la meme signification qu'au Canada (sport et vitesse en se rendant a son travail). Il est un moyen de locomotion exclusivement sur le trottoir plus rapide que la marche a pied. Notre premier contact avec ce nouveau continent est une nouvelle fois une etape qui va crecendo. Apres la Bolivie, le Canada puis l'Alaska nous avaient apparu nettement plus cher. Avec le Yen, le cout de la vie a passe un nouveau palier. 28 francs le café ! Les calculs de prix dans les vitrines calment immediatement nos envies de restaurants.Nous choisissons dans des petites superettes des boites repas (o-bento ou ekiben), repas presentes dans une boite compartimentee, que nous consommons dans la rue. Ces mets sont toujours d'une extreme fraicheur, car l'hygiene est tres scrupuleusement respectee.

1500 KILOMETRES D'ENFER.

Nous sommes en Asie, dans l'archipel de Kyushu et le decalage horaire aidant, nous mettons 48 heures a sortir de la ville. Apres 60 kilometres de Fukuoka , nous sommes toujours dans les arteres des zones commerciales et industrielles. Les voies sont tres etroites. Pas d'emplacement pour les bicyclettes si ce n'est sur les a cotes de la route. Les soi-disant pistes cyclabes sont des bouts de trottoirs souvent defonces car non entretenus et parfois interrompus sans prevenir. Nous commencons a etre froles par des camions. La sequence frisson, stress, pollution commence et cela va durer plus que l'on ne le pense. Nous devons tantot rouler a droite, puis sur un trottoir puis parfois traverser faute de place de l'autre cote de la route pour rejoindre un autre bout d'espace vital.Nous sommes scandalises, enerves par le fait que rien n'est concu pour les cyclistes, bien au contraire ! Dans cette chaleur et cette humidite, nous ressentons egalement des brulures venant de paillettes noires qui se deposent sur notre peau et qui semblent provenir des gaz d'echappements ou des raffineries voisines. Nous luttons et craquons les premiers jours. Cela n'est pas supportable. Nous devons trouver un moyen de locomotion autre que le velo. Nous nous tournons alors vers des compagnies de bus puis la compagnie nationale de train. Apres d'interminables explications nous devons constater qu'au Japon les velos ne peuvent rentrer ni dans les bus ni dans les trains ! ! ! Nous nous voyons donc dans l'obligation de ralier Tokyo par notre fidele moyen de locomotion.Nous pensons alors que le jour ou quelqu'un viendrait a nous questionner sur le Japon a velo, nous le lui deconseillerons vivement ! Chaque jour voit son lot d'averses plus ou moins longue. C'est la saison des typhons auquel nous avons la chance de n'avoir que quelques effets. A chaque etape, nous nous renseignons sur leur evolution. Nagoya est innondee pendant quelques jours une semaine avant notre passage. Dans ce periple Fukuoka-Tokyo, c'est une vingtaine de tunnels que nous devons franchir. Afin d'eviter l'accident, nous devons utiliser pour certains d'entre eux une technique « d"obstruction ». Nous obligeons un vehicule a ralentir avant l'entrée dans le tunnel et nous nous glissons devant le vehicule, positionnes cote a cote. Ainsi nous traversons la montagne avec notre bouclier de protection. Plutot sport et angoissant mais efficace ! Sur cette route plutot desagreable et monotone, nous constatons une indifference des japonais. Cependant quelques uns nous etonnent par leur geste. Tel des ravitailleurs d'une course cycliste, ils se postent au bord de la route et nous tendent un sac avec boissons fraiches achetees quelques minutes avant, a notre attention. A peine le temps de leur dire « Domo arigato », merci beaucoup, ils repartent et disparaissent dans leur vehicule. Etonnant Japon.

RENCONTRES ET DECOUVERTES DE FOYER JAPONAIS

Difficile de trouver un coin sauvage a l'abri des regards au milieu de toutes ces habitations, ces bureaux, ces usines et routes. Nous choisissons donc le «knoking » c'est a dire la recherche d'hebergement chez l'habitant, pour notre deuxieme nuit au Japon.. Nous commencons a 17 H., car la nuit tombe vers 18H. Cela nous laisse juste une heure pour trouver un abri, nous savons que la nuit venue, nous avons beaucoup moins de chance de voir une porte s'ouvrir pour nous accueillir. Nous avons 100% de reussite, la premiere demande est la bonne. Nous plantons la tente, accueillis par la mere de famille alors que le mari arrive de son travail. A peine a-t-il range sa moto, il nous installe l'eclairage devant la tente, une prise dans la tente pour mettre un appareil pour les moustiques. Nous sommes invites a prendre une douche, puis a passer a table. Notre premier repas se passe a table avec des chaises et non sur un tatami. Nous echangeons dans un anglais rudimentaire. Ils appellent au telephone leur connaissance pour nous les passer ensuite et parler en anglais. Puis, c'est le tour des amis, des voisins et famille. Ils viennent voir les « friends » (amis) francais. Une jeune fille arrivant d'un stage de francais a Grenoble, nous servira d'interprete a la fin de la soiree. Apres le petit dejeuner, c'est la séance des presents, amis, famille et voisins sont de nouveau la pour nous offrir des cadeaux (bonbons, tee-shirt, .). Nous sommes abasourdis par ces messages d'amities. Alors qu'un typhon est prevu pour la nuit, une americaine mariee a un japonais, Dana, nous propose de venir chez elle pour attendre la fin du deluge. C'est l'occasion d'apprendre a realiser une recette de sushi et surtout d'echanger nos impressions sur le pays et ses habitants. Les jours passent et les difficultes sont croissantes. Nous passons de 5 a 10 puis 15 et meme un soir a 20 refus. Ce soir la, nous finirons malgre un temps tres menacant dans un chantier de construction. Nous prenons notre petit dejeuner comme diner et nous couchons un peu en colere. La regle est simple, si nous passons le pas de la porte, nous sommes traites comme des princes. Dans le cas contraire, on reste a l'ecart, etranger a la vie familliale, exclus. Les refus sont souvent difficile a vivre. Lorsque l'on s'approche d'une personne, et que celle-ci court pour s'enfermer dans sa maison, ou que la porte se referme apres nous avoir vu. Il nous arrive aussi d'en rire, lorsque nous demandons une place sure et que l'on nous indique le pont : oui sous le pont c'est une place sure !. ou encore que l'on nous tende une piece pour poursuivre notre route ! ! ! Ce sont des moments ou l'on se regarde pour voir si l'on a beaucoup change. Pourquoi ici au Japon, on ne nous prend pas au serieux lorsque l'on dit que l'on voyage ? Nous n'avons jamais ressenti cela depuis le debut de notre voyage. Ici, l'etranger fait peur.surtout le soir venu. Et pourquoi cet ecart entre le refus sans condition et l'accueil princier. Un soir, nous insistons un peu, l'homme n'est pas vraiment d'accord, la femme ne dit pas non. C'est finalement le frere dans la maison d'a cote qui nous a accepte. Apres une bouteille de whisky, le premier nous a avoue qu'il a peur de recevoir des etrangers. Le lendemain, nous prenons le petit dejeuner chez lui, et la, meme rituel de present avant notre depart avec les pauses photos. Nous pensons que les personnes qui ont voyage sont plus sensibles a notre demarche. Pourtant, nous rencontrons des courageux. Pas un seul mot d'anglais, des gestes, des dessins pour se faire comprendre. C'est tres frustrant pour nous. Pour eux, cela ne les genent guere, ils parlent en japonnais comme si nous les comprenions. Nous sommes souvent au bord du fou rire mais nous avons trop de respect pour ces personnes, mais c'est tres dur. Les rencontres se deroulent a peu pres toujours de la meme maniere. Une fois passee la porte, nous sommes invites a boire. Autour d'une biere, nous tentons d'expliquer notre voyage avec la mappe monde , quelques photos et des dessins. Pour montrer l'interet qu'ils ont a nous ecouter, ils font comme des grognements, que l'on peut comparer a un « ah bon... , c"est bien.. » mais cela donne « OOOOOOO OOOO» tres grave, profond et long. C'est l'occasion pour eux, de nous montrer les photos de leur vacances, souvent en Europe avec la photo devant la Tour Eiffel ou une place quelconque. Nous souhaitions voir le resultats de ces photos. En effet, c'etait l'image que nous avions des japonnais, toujours l'appareil en bandouillaire. C'est un moment de détente pour nous, meme si cela demande de la concentration pour comprendre les questions, mais apres une journee horrible sur la route c'est important. Nous echangeons nos adresses (postales et e-mail) et pensons garder le contact avec certains qui passeront en France l'an prochain. La question qui revient systematiquement est au sujet de notre age. Nous avons appris quelques mots et phrases en japonnais et donnons la reponse dans leur langue « San ju roku pour Liliane et San ju hachi pour Pierre ! » Cadeaux et presents Il est de coutumes, lorsque l'on est invite de venir avec un present. L'emballage etant aussi important que le present lui-meme. Pour nous, c'est l'inverse, ce sont les personnes qui nous recoivent qui nous offrent des presents. C'est souvent au moment du depart, apres la séance photo. Nous recevons ainsi divers cadeaux allant de l'alimentation (bananes, poire-pomme, fruits sec et raisins), a la boite repas chaude preparee par la maitresse de maison pour notre repas de midi, au tee-shirt, eventail en plastique, boissons energetiques mais aussi aux boites de distributeurs de mouchoirs en papier ! ! ! Les interieurs Les maisons que nous avons pu visiter, se presentent presque toutes de la meme maniere. La maison est en bois, et les portes sont coulissantes. A l'entrée, nous laissons les chaussures pour marcher pied nus ou nous enfilons des pantoufles. En entrant a gauche, une ou deux pieces avec tatami (matelas de paille de riz battue et compressee recouvert d'une natte en fibre vegetale tissee, d'un format fixe de 1,80 m sur 0,90 m qui dallent le sol), la, pas question de rentrer avec des pantoufles, on doit etre pieds nus. Un couloir longe cette piece faite de cloison mobiles ou meme amovibles - cadres de bois tendus de papier translucide ou panneaux et portes glissieres opaques qui permettent de moduler rapidement l'espace d'habitation, selon les besoins. Le long du couloir, il y a les toilettes et la salle de bain. En entrant a droite, c'est la cuisine, qui peut servir aussi de salle a manger. En general, c'est une piece sombre et triste. Le materiel present est simple, un refrigerateur, un auto-cuisseur pour le riz, un gaz a trois feu, un petit grill pour le poisson et enfin une bouilloire electrique pour l'eau des soupes et du the. Les toilettes sont differentes suivant les maisons, a meme le sol, ou bien truffees d'electronique (chauffage, petit jet,bruitage.). Par contre, de partout, sauf chez Thomas et Shan, il faut toujours enfiler les pantoufles speciales toilettes. Le plus difficile, c'est de penser a les retirer avant de retourner dans la piece principale. Mais evidemment apres une journee de velo, nous avons des absences et il nous arrive de devoir repartir en courant aux toilettes pour retourner les chaussons en question.avec un debut de fou rire. De plus, on se lave toujours les mains avant d'en sortir. Lorsque la chasse d'eau est tiree, un filet d'eau au dessus des toilettes coule, c'est en fait le reservoir d'eau qui se rempli mais qui peut au passage vous rincer les mains. La salle de bain est faite de deux parties, une avec le lavabo et la machine a laver, l'autre avec douche et baignoire. Apres la douche, c'est le bain dans une eau a 40 degres. Pas facile d'y sejourner. La baignoire est ensuite recouverte pour servir plusieurs fois. Cette pratique rappelle les bains dans les onsens, sources thermales d'eau chaude lie aux phenomenes perivolcaniques. La salle a tatami est la piece ou l'on recoit, ou l'on regarde la television mais aussi ou l'on prend les repas de fetes. Nous aurons location de partager les diners dans cette piece mais aussi de prendre le repas seul. S'assoir par terre pour manger n'est pas une chose facile pour nous, surtout apres une journee de velo. Nous avons surtout besoin d'allonger nos jambes. Les larges avant-toits ont tendance a assombrir les pieces. Le papier translucide des SHOJI filtre la lumiere et les couleurs naturelles des materiaux l'absorbent plus qu'ils ne le reflechissent. Ce cadre sobre, baigne par une lumiere diffuse, ne peut que mettre en valeur le mobilier, au demeurant tres depouille. On roule les matelats (futon) dans les placards, on s'asseoit sur des coussins (zabuton) et on mange sur un plateau a quatre pieds. De l'exterieur, les maisons ne font pas trop grandes mais il y a une multitude de pieces avec des jardins a l'interieur. Sous un meme toit, il est courant de voir trois generations. C'est l'aine des enfants qui est charge de veiller sur les vieux jours des ses parents. Nous avons meme vu un lit dans la piece a tatami au centre de la maison. C'etait la grand mere, mais plus qu'une tradition, ils nous avouent que les frais d'hopitaux sont trop importants donc les soins se font a la maison. Les exterieurs L'architecture traditionnelle nippone se caracterise par sa concision, ses lignes douces et fluides, une conception modulaire et une utilisation fonctionnelle de l'espace interieur, par des jeux d'ombre et de lumiere, des materiaux sobres (bois, papier, paille de riz) et des couleurs discretes. Il y a essentiellement des maisons individuelles. Elles sont tres raprochees les unes des autres, et les rues sont vraiment tres etroites. Le jardin japonais - qu'il imite la nature ou qu'il la recree sous une forme stylisee et symbolique - subit l'action du vent, de la pluie et du soleil, mais il n'en reste pas moins un paysage en reduction, une composition artificielle concue pour etre contemplee depuis la veranda ou de l'interieur de la demeure. La cuisine japonaise Les repas sont souvent copieux en choix et la presentation est tres appetissante. Nous voyons arriver au fur et a mesure differents bols et assiettes. Le bol de riz blanc, dans lequel il ne faut pas ajouter de sauce, le bol de soupe de tofu, qu'il faut boire par petite gorgee et en faisant du bruit en aspirant, les feuilles d'algues (nori) que l'on trempe dans une sauce avant de former un petit rouleau avec le riz et tout cela avec les baguettes (o-hashi)! ! ! Il y a aussi des beignets (aubergines, courgettes du jardin, langoustines, crevettes,.) que l'on trempe dans une autre sauce. Et enfin les sushis, petites boulettes de riz vinaigrees surmontees ou farcies d'une tranche de poisson cru, de coquillage, voire d'oeufs de poisson. Ils sont de la taille d'une bouchee et toujours presentes avec art, servis par paire et accompagnes de gingembre au vinaigre. Ces plats, servis en meme temps, sont degustes sans suivre d'ordre special. Le the japonnais est amer et se boit par petite gorgee au cours du repas et nous sommes rarement reservis. Par contre, pour nous faire plaisir, nous sommes servis en biere, quelque fois en vin et en sake. Tout cela au cours du meme repas. Ce n'est pas facile a gerer. Surtout que l'on ne se sert pas soi-meme. La politesse exige que l'on se serve mutuellement. Les petits dejeuners sont tres copieux et varient suivant les familles, mais nous devons nous lever assez tot. Ils veulent profiter de nous. Nous supposons aussi qu'en notre honneur, il y a eu des variantes. Il se composent d'un bol de soupe, d'un bol de riz, de fruits peles, d'un petit bol de the japonais. Ca c'est la base. Nous avons eu des oeufs au plat, une autre fois un oeuf dur ou encore un poisson grille (pas facile a 6heure du matin ! ! !). Le lait n'est pas souvent present sur la table ni les laitages comme les yaourts. Ils apprecient beaucoup le pain facon francaise mais n'en consomment pas vraiment. Les religions Les japonais ne pratiquent pas une religion mais des religions. La religion fait partie integrante de la vie de tous les jours, sans qu'on en ait reellement conscience. Elle s'exprime en pratiques rituelles, en ceremonies et en coutumes, plus que comme une veritable foi. Les japonais s'arretent souvent dans un sanctuaire shinto pour se receuillir un instant, avant de reprendre leur chemin. Mais ces gestes ne sont pas tant accomplis par pure devotion que par souci de conformite. De meme, les notions de labeur et de sacre sont intimement liees, ce qui explique la fameuse ardeur au travail des japonais.

COMMUNICATIONS

Le language des gestes Pour communiquer, lorsque notre liste de phrases japonaises est epuisee, nous continuons la conversation avec des gestes. De meme, il a fallu apprendre la codification des gestes japonais qui sont quelque fois accompagnes de son. Le « DAME DAME », qui s'accompagne du croisement des mains ou des index pour former un « X », n'est pas positif pour nous. Il se traduit par un : « jamais jamais surtout pas ». Au moins c'est clair. L'emploi du « non » est pratiquement banni, la negation etant consideree comme une manifestation aussi grossiere qu'agressive. En fait, l'usage du « non », ou « iie », correspond davantage a l'expression de « de rien » en reponse a des remerciements. Mais pour nous repondre a notre demande d'hebergement lorsque c'est negatif, ils agitent la main gauche devant leur visage comme pour chasser les mouches tout en gardant le sourire et baissant la tete. Nous avons mis plusieurs jours pour identifier ce geste. Pour nous proposer a manger, plus simple, ils simulent les baguettes avec deux doigts de la main droite et le bol de riz de la main gauche. Facile a comprendre, mais nous avions l'habitude de baisser la tete pour marquer notre approbation, hors ceci etait negatif pour eux. Donc, nous nous employons a ne rien dire ni faire et attendre avec un grand sourire. Pour la douche, facile aussi, ils simulent l'eau qui nous tombe dessus, dans ce cas nous faisons les gestes « OK ». Pour cela, il faut former un « O » avec le pouce et l'index, comme en plongee. Plus difficile, et nous venons a peine de le comprendre avec l'aide de Thomas et Shan, c'est lorsqu'ils nous demandent de les suivre, nous on pensait qu'ils nous demandaient de partir. Ils se dirigent dans la direction a suivre, allongent le bras droit dans leur dos a l'horizontale et bougent la main de haut en bas, tout cela en nous tournant le dos. Lors des conversations, nous sommes a la limite du fou rire. Lorsqu'ils parlent d'eux, pour dire ma mere, ma maison, ils posent l'index sur leur nez. Nous les faisons aussi bien rire, surtout a table, meme si nous arrivons a manger avec les baguettes, nous avons quelques fois des difficultes, par exemple pour manger un oeuf dur ou un poisson grille, je vous propose de faire l'essai. Difficultes de communication Nous devons par moment aller a la peche aux renseignements ou simplement acheter des timbres et expedier des courriers. Nous nous heurtons a des problemes de communication. Nous posons toujours la meme question en japonais et en anglais : parlez-vous anglais ? Premier choc de la personne en face de nous. Elle est deja perdue, uniquement en nous voyant ! ! ! Nous sommes etranger et source de problemes. La deconvenue se lit sur le visage de la personne. Apres notre premiere question, soit elle repond avec la main pour chasser les mouches et se met a rire. Pas bon du tout.Ou bien. elle parle a ses collegues et tout le monde rit sauf nous. Nous tentons d'expliquer en l'ecrivant que nous souhaitons des timbres pour la France. Elle se met a ouvrir frenetiquement plusieurs tiroirs ou ouvrir de gros livres, puis part en courant dans un autre bureau, revient rit et attend. Nous redemandons, faisons des dessins, des signes, elle part de nouveau en courant revient en courant avec son chef qui court aussi. Non, nous n'exagerons pas, c'est du vecu et a plusieurs reprises. Il arrive parfois, qu'ils prennent le telephone, parlent un moment puis nous font comprendre qu'ils ne peuvent rien pour nous mais il s'est passe entre temps plus de 15 mn. Ils sont tres vite perturbes. Dans le cadre de leur poste, ils ont des fiches techniques pour savoir comment remplir les documents mais si l'information n'est pas dans le bouquin, ils sont perdus. Nous sommes un peu severe mais nous pensons que bon nombre d'entre eux sont incompetents, tres lents et tres desorganises. Ce sentiment nous a ete confirme par les etrangers travaillant dans ce pays. Les J.O. C'est le passage d'un typhon qui nous a permis de voir la ceremonie d'ouverture de J.O.. En effet, la pluie incessante a eu raison de nous et nous sommes alles nous refugier chez Tomo. Une rencontre a Fukuoka nous avait donne son adresse. Depuis nous ne voyons que les epreuves ou les japonais participent. Les autres n'existent pas. En natation, on ne voit que la nageuse nippone comme si elle etait seule.Dans les journaux, nous nous faisons traduire les resultats. Nous pensions que les francais etaient chauvins, mais nous constatons que la television japonaise est a la limite de la propagande. Prestige de la France ou Petit clin d'oeil Certains magasins portent des noms francais. Ce sont des magasins de prestige. Avoir un nom francais comme enseigne fait tres tres chic. Le nom n'a pas toujours de rapport avec les produits vendus, et quelquefois n'a aucun sens. Ce sont aussi bien des restaurants (avec le drapeau a l'entrée), des salons de the (comme le Café des Pres qui propose des patisseries bien francaises : Tartelettes aux pommes ou encore Choux a la crème) ou des magasins de vetements.

HIROSHIMA

C'est a 8h15 le 6 aout 1945 que l'avion americain Enola Gay lache une bombe A sur la ville. Une nouvelle page de l'histoire de l'humanite est tournee lorsque le champignon atomique - boule de lumiere- dont les consequences sont jusque la inconnues, aneantit soudain toute forme de vie sur un rayon de 4 kilometres. En quelques secondes, la ville d'Hiroshima est rayee de la carte. 200 000 victimes. Nombre de ceux qui reussissent a survivre sont immediatement affectes tant sur le plan physique que psychologique et continuent a en subir encore les effets. 3 jours plus tard, le Japon n'ayant pas capitule, c'est la ville de Nagasaki a l'ouest du Japon qui subit une bombe N provoquant 70 000 victimes. Pourquoi la bombe atomique a t-elle ete larguee sur Hiroshima ? En aout 1942, les Etats Unis lancerent le projet Manhattan visant a produire une bombe atomique. Le 16 juillet 1945, les Etats Unis reussissent le premier essai d'armes nucleaires dans le desert du Nouveau Mexique. Les U.S. voulaient forcer le Japon a se rendre aussi rapidement que possible afin de minimiser les pertes americaines. L'Union Sovietique avait en outre signe un accord secret a la conference de Yalta, en fevrier 1945, annoncant son entrée en guerre contre le Japon. Les Etats Unis souhaitaient utiliser la bombe atomique avant la concretisation de cet accord pour pouvoir etablir leur predominance apres la guerre. Par ailleurs, les Americains voulaient etre les premiers a attaquer avec une bombe atomique en vue d'en mesurer les effets. Vers la fin de la guerre, la plupart des grandes villes japonaises avaient ete detruites par des attaques aeriennes americaines. Hiroshima etait encore intacte. Deux raisons expliquent le choix d'Hiroshima comme cible : 1 La taille et la topographie de la ville convenaient bien a l'observation du pouvoir destructeur de la bombe atomique 2 Hiroshima contenait une concentration elevee de troupes, d'installations et d'usines militaires qui n'avaient pas encore subis de dommages importants. Aujourd'hui le musee de la paix reccueille et expose des objets abandonnes par les victimes, des photos et d'autres documents retracant l'horreur de cet evenement auquels s'ajoutent des expositions decrivant Hiroshima avant et apres le bombardement, ainsi que d'autres presentant l'etat actuel de l'ere nucleaire Chaque article expose incarne la peine, la colere et la douleur des gens qui ont existe. Les objets presentes prouvent la violence de la bombe atomique : uniforme des ecoliers, gamelles carbonisees, montre arretee a 8h15, volets plies par l'explosion, bouteilles fondues. Selon la proximite avec l'hypocentre les dommages resultants des radiations, de la chaleur et de l'explosion sont edifiants. La veille de notre visite de la ville, Mino, notre hebergeur de 61 ans ( 6 ans le jour de la bombe) nous apprend que sa mere a fait partie des victimes.Lui, enfant a l'epoque avait ete ecarte de la ville d'Hiroshima. Nous traversons egalement le parc memorial de la paix (Heiwa Kinen Koen) a proximite du Dome de la bombe atomique (Genbaku Domu) lui meme situe au point d'impact presume de la bombe. Ce monument n'est guere plus que le squelette de l'ancien batiment de l'Office de la promotion industrielle et a ete laisse en ruine en guise de temoignage. La statue des Enfants de la bombe atomique est dediee a une petite fille morte d'une leucemie due aux radiations. Elle avait entrepris de realiser mille petites grues en origami (pliage de papier) en guise d'ex-voto. Aujourd'hui des ecoliers de tous les pays viennent y deposer des guirlandes de grues de papier. La ville d'Hiroshima aujourd'hui plus d'un million d'habitant s'est relevee de la catastrophe atomique. L'elimination de toutes les armes nucleaires ainsi que la realisation d'une communaute mondiale vraiment pacifique est son souhait le plus profond.

KYOTO

Si Kyoto fut ravagee par la guerre civile d'Onin (1467-1468), elle eut la chance extreme de ne subir aucun dommage pendant la seconde guerre mondiale. Derriere ses allures modernes, elle a conserve une telle empreinte du passe qu'elle est encore aujourd'hui un haut lieu culturel. C'est la que l'on peut visiter les plus beaux sanctuaires, temples et jardins. Le plus difficile pour nous sera de nous reperer. Nous perdons un temps fou dans ce meli-melo de rues. De plus, la plupart des sites ne sont pas traduit et nous les reconnaissons d'apres les photos dans notre guide. Nous aurons l'occasion de prendre quelques minutes de repos dans un veritable havre de paix le long du fleuve Katsura aux portes de la ville (Arashiyama).

JAPON AVANCE TECHNOLOGIQUE ET HUMAINE ?

Nous pensons trouver un Japon a la pointe du progres et a la technologie triomphante. Nous ne remarquons rien de particulier en ce qui concerne la vie de tous les jours. L'utilisation des telephones portables est tres impressionnante. Tout le monde en a un, du plus petit au plus grand, pas encore les personnes agees. Au niveau technologique pour ce materiel, ils ont quelques mois d'avance sur la France. Les voitures sont toutes en excellent etat, elles recoivent de nombreux soins et sont essuyees a chaque passage a la pompe a essence. Certaines sont equipees de systeme de guidage electronique. Dans les maisons, il n'y a pas beaucoup d'electromenager, pas d'appareil electronique particulier. Pour enrayer le chomage, les entreprises creent des petits metiers. Dans les stations service, de 3 a 4 jeunes accueillent les voitures et chacun se precipite soit pour faire le plein soit essayer la carrosserie meme par temps de pluie soit les vitres ou encore la poussiere sur les tapis. De meme, au bord des routes pour signaler des travaux, ils sont plusieurs pour agiter un drapeau. Dans les entreprises, peu d'evolution. C'est le systeme d'anciennete (nenko) qui est toujours tres ancre dans les societes japonaise. Le chef de service doit consacrer une bonne partie de son temps a etablir et a entretenir de bonnes relations personnelles, a maintenir le consensus et a developper l'esprit d'equipe au sein de leur service. C'est un role extremement exigent qui oblige a prendre sur ses heures de loisir pour aller jouer au mahjong avec les employes, le soir ou le week end, a assister au mariage de ses co-equipiers ou encore a jouer au golf avec ses clients. Il n'est pas correct de partir en vacances plus d'une semaine consecutive, cela ne se fait pas. De plus, il est bien de ne pas utiliser ses 15jours de conges. Lors des absences pour maladie (1 ou 2 jours), les jours sont preleves sur les conges. Les jours feries sont souvent suivis de jours de conges obligatoires, ce qui amene a des situations economiques difficiles. Le cout de la vie augmente sur ces periodes, et il est en plus difficile de partir, les places (avions, train ou bus) sont toutes prises d'assaut et les prix sont prohibitifs. Ce n'est pas le niveau de competence ni les resultats du travail qui va jouer sur l'evolution dans la societe, c'est l'anciennete avant tout. Pour se detendre, le japonais du patron jusqu'au simple employe, va jouer en fin de journee au pachinko. Ces machines a sous, voisines du flipper, se presentent sous la forme de tableaux verticaux. Le jeu consiste a propulser une bille a travers un labyrinthe de chicanes. Si le coup est reussi, une serie de billes retombe et le jeu peut continuer. Le Pachinko est un veritable phenomene de societe. Le japonais restant litteralement hypnotise par leurs tableaux des heures durant dans un vacarme assourdissant. Le relief tourmente du Japon laisse peu de place a la vie humaine. En consequence, les japonais ont du deployer des tresors d'ingeniosite pour dompter une nature eminemment hostile et exploiter au maximum le moindre lopin de terre. Ce qui explique qu'ils evoluerent rapidement vers des techniques agricoles avancees et une exploitation rationalisee des terres. Toutes les activites economiques sont concentrees dans ces plaines qui representent seulement 20% de la superficie du pays, etroites bandes de terre ou usines, exploitations agricoles et agglomerations urbaines rivalisent aprement pour s'octroyer le moindre petit espace. En moins d'un siecle, le pourcentage de la population rurale est passe de 78% a 5%. Aujourd,hui, le vieillissement de la population rurale est tel que certaines communautes sont devenus de veritables villages fantomes : cultiver des mouchoirs de poches n'est valable qu'a coup de larges subventions gouvernementales, et la jeune generation tend de plus en plus a delaisser l'exploitation familiale au profit des metiers plus rentables de la ville. La peche connait un net ralentissement. Pratiquee de facon excessive, elle s'est traduite par un epuisement du vivier naturel au large de l'archipel, si bien que les chalutiers doivent parfois s'aventurer sur des mers lointaines. Nous sommes vraiment surpris de la transformation des paysages. Les japonais s'enorgueillissent de leur etroite communion avec leur milieu. L'homme fait partie integrante de la nature et, par consequent, s'octroie le droit de la modifier a sa maniere (confection des bonzais). Ainsi, un jardin, si arrange soit-il, n'a rien d'artificiel a leur yeux, mais reste toujours une parfaite expression de la Nature. Nous aurons l'occasion de voir des jardins d'enfants sous des ponts d'autoroutes, sans arbre ni verdure. Ou encore, des maisons en construction sous d'immenses pylones electriques a haute tension. Modifier a tel point la nature nous semble etre un offence a la nature elle meme. Mais nous ne sommes que de simple voyageur, qui observons et nous ne sommes pas la pour juger.

MAINTENANT LA CHINE

Si nous mettons 180 kilometres avant d'apercevoir un bout de verdure en sortant de Fukuoka, nous rentrons dans Tokyo en deux jours. Ville tentaculaire, la conurbation Tokyo-Kawasaki-Yokohama compte une trentaine de million d'habitants. La gorge nouee par la pollution de la banlieue, nous arrivons dans le centre de Tokyo, vraiment satisfait d'en terminer. L'arrivee a Tokyo est facilite par la presence et le soutien de Thomas et Shan, un couple de vosgiens expatries depuis 3 ans au Japon.Ils travaillent tous les deux dans des entreprises francaises en tant qu informaticien. Nous avons eu pendant 25 jours un regard assez critique sur le pays . Par leur experience et leur approche des entreprises, nous avons pu expliquer certaines situations que nous avons vecues et citees dans ce recit. Pays aux multiples facettes, qui ne cesse chaque jour de nous derouter, culture difficile a apprehender parfois. Nous avons decouvert non sans la comprendre dans ses details, une culture vraiement differente de la notre Les visas dans la poche, nous partons samedi 30 septembre, jour des 12 ans de Marion, pour la Chine. Nous nous attendons a de nombreuses complications administratives. Nous ressortons le filtre a eau et nous nous rappelons les mesures d'hygienes elementaires.

A tres bientot a tous. Liliane et Pierre